La légitimité du rôle [la doublure du costume !]
La Mairie de Toulouse, by night [source]
La légitimité démocratique du Président Sarkozy ne fait aucun doute. Il a su utiliser [à bon escient ?] les outils fournis par notre société actuelle pour convaincre assez d'électeurs du bien fondé de son projet.
Mais de là à prétendre que le pays aurait donné une autorisation globale et illimitée pour faire tout et n'importe quoi, c'est quelque peu abuser de notre sens républicain.
La construction de notre système français s'est faite par la création d'une succession de carrefours où les choses sont observées, décortiquées et mises à l'approbation des représentants du peuple.
Rien que dans mon quartier, on me consulte pour décider de la couleur du bitume quand il s'agit d'en changer et je n'aurais rien à dire sur le néo-ripoliné et rapetissé Traîté Européen ? [je note donc que si on l'a simplifié, c'était pour le rendre compréhensible par les Députés].
On supprime, à travers la taille franche qui est faite parmi les tribunaux, la présence du bras de la justice dans les contrées trop lointaine du pouvoir central et je suis sensé trouver que c'est un progré ? [sans compter que rien que les frais pour les dépacement des avocats et des experts, voire les indemnités de déménagement, ça va sans doute nous coûter plus cher !].
Mais au delà de ces premiers crachats sur la démocratie, ce qui m'inquiète plus encore, c'est d'entendre Nicolas Sarkozy nous parler de son destin. Même son entourage proche en témoigne [j'ai même vu sa mère en parler sur TF1], il est convaincu de l'accomplir, en tant que Président de la République.
Comme d'autres avant lui, il se prétend une mission qui était à lui seul destinée.
Avant même que vous n'ayez pensé choisir son bulletin de vote, il savait qu'il serait un jour à ce poste. Comme si l'élection elle-même ne faisait que finaliser ce qui était déjà écrit.
Le 6 mai dernier, Nicolas Sarkozy est donc devenu le premier Président de Droit Divin, sinon divinatoire. N'oubliez jamais qu'il avait été auparavant hanté par la vision fanstamagorique du Rôle qu'il aurait dans l'Histoire.
Le petit monstre intérieur que représente la valorisation d'un ego dont on doute grignote peu à peu, le sens des réalités. Tout ce qui s'oppose aux bienfaits qu'on croit partout répandre, tout ce qui freine la venue de la félicité est soit traîté d'impie soit tout simplement nié [par exemple, il ne faut pas lui parler de son divorce ni de sa rémunération].
Puisqu'Il est élu, Il ne peut pas «mal agir». Le concept même de l'erreur devient une chose impossible et définitivement abolie puisqu'Il suit simplement le chemin que des instances autrement supérieures ont tracé pour sa venue.
Poussé par le doigt de D.ieu [qu'Il se met dans l'œil], aveuglé par l'obsession de sa propre réussite, Nicolas Sarkozy est aujourd'hui pour moi comme le bateau ivre de Rimbaud, habité perpétuellement par toujours d'autres lieux que les lieux qu'Il habite, aspiré sans cesse par la prochaine aventure à vivre.
Il est comme un petit garçon à qui l'on offre la panoplie de Superman dont Il rêvait si fort qu'Il en croit vrai les effets magiques. Il n'a pas fait qu'endosser le costume, Il l'a, dès le départ, fait doubler de sa vision obsessionnelle du rôle.
Toute la question est maintenant de savoir s'Il va continuer à maintenir en place son fantasme, à mettre tant et tant d'énergie dans sa continuation, ou s'Il va céder face aux bords coupants de la réalité.
La démocratie, ce n'est pas de prendre le blanc-seing du peuple pour ne plus en écouter la voix. Ce n'est pas de considérer qu'on peut être sourd à quarante-sept pour cent des électeurs parce qu'on a débauché trois carriéristes et deux potiches du camp d'en face [à vous de trouver qui est qui !].
Chaque décision qui entraîne une modification du type de société que nous avons bâtie ensemble, devrait nous être soumise à référendum. Chaque changement dans l'équilibre précaire établi par nos votes entre les différentes classes sociales devrait obtenir auparavant notre accord.
Sommes-nous systèmatiquement cinquante-trois pour cent à approuver sa stratégie et ses choix politiques ? Allons-nous encore longtemps et majoritairement accepter cette absence de dialogue et ce diktat définitif apposé à la fois sur les problèmes et sur les solutions à mettre en œuvre pour les résoudre.
Ou bien allons-nous enfin, en bons usagers de la démocratie républicaine et par notre vote aux prochaines municipales, rappeler au Président tout ce qu'il nous doit ?